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Le début de l'aventure

Écrire, écrire, pourquoi du jour au lendemain s’asseoir devant un clavier pour entamer non pas un marathon mais l’équivalent de mille marathons ? Il parait qu’il y a plus de Français qui écrivent que de Français qui lisent. C’est sûrement exagéré, mais la boutade traduit une indéniable attirance pour la littérature. Cet engouement est le fruit, diront certains, d’un triste malentendu. Il résulte d’une confusion malheureuse entre la pratique austère d’une discipline sans concession et le mirage d’un petit rêve inavoué, celui d’une notoriété médiocre et factice. On peut le penser, c’est souvent vrai, mais la réalité est parfois faite d’une trame curieuse où les contraires s’entremêlent pour poser un piège redoutable, aux conséquences imprévisibles.

Cela a pu débuter comme ça. Vous lisez un roman, pas trop mal écrit, avec des idées simples, les bons, les méchants, une ambiance tout de même, un ou deux personnages attachants et une intrigue qui vous pousse à tourner les pages. Alors, précisément parce que l’œuvre est moyenne, ordinaire, elle vous paraît accessible, à l’opposé des sommets que sont Céline, Duras, Camus, Faulkner, Rimbaud et quelques autres encore. Et, dans un accès de nonchalance coupable, vous vous dites « pourquoi pas moi ». Vous commettez alors une terrible erreur. Vous n’avez rien compris. Écrire est toujours très difficile, même mal-écrire est pénible et laborieux, surtout, mal-écrire est une souffrance. Vous vous lancez donc et vous êtes loin d’imaginer la monumentale gamelle qui vous attend dès le premier virage franchi. Vous ne serez évidemment pas publié, mais le mal est fait, vous êtes atteint d’une addiction nouvelle. La vexation d’avoir échoué et l’envie de notoriété sont curieusement passées à l’arrière-plan, remisées dans une arrière-cour, celle des vanités ordinaires. Un rêve himalayen a tout balayé.

Désormais vous allez vous abreuver de lectures, vous vous plongerez dans la magie des grands auteurs cités plus haut, dont la mémoire a survécu aux médiocrités des modes. Vous lirez encore et encore leurs œuvres intemporelles et vous tenterez de comprendre. Que signifient, non pas bien écrire, mais le style, la musique ? Qu’y a-t-il de dissimulé derrière des mots et des phrases à l’agencement souvent d’une simplicité étonnante. Vous vous demanderez pourquoi ils vous transportent dans des contrées inexplorées, alors que la majorité des succès contemporains — dont celui qui a provoqué le fatal déclic — ne survivent guère à l’enthousiasme des premiers moments. Si au commencement de l’aventure, il y avait vis-à-vis de votre démarche de sérieux soupçons, vous avez, depuis, été très sévèrement puni. Vos faiblesses ont été les causes d’un égarement dont vous n’êtes pas prêt de revenir. Vous continuerez bien sûr à vouloir vendre votre modeste production car il faut persévérer, le commerce aussi a ses droits, mais le trésor de la fable est ailleurs, il constituera cette insatiable quête dont vous aurez du mal à vous défaire.

Fin de l’histoire, revenir à la réalité des projets.

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